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Plateresque à Salamanque

Et, non, il ne s'agit pas d'une spécialité locale. Le plateresque se déguste mais ne se mange pas !


Après notre passage au monastère de Santo Domingo de Silos, nous voici partis à la découverte de Salamanque. Denis a repéré un bel emplacement, aux alentours de Salamanque et au sommet d'une falaise aux pieds de laquelle s'est déroulée le 22 juillet 1812, la bataille des Arapiles.


Ermitage de Calvarrasa de Arriba


Cette bataille oppose l'Europe coalisée (le Royaume-Uni, le Portugal, et pour la première fois un bataillon espagnol) aux troupes napoléoniennes qui occupent l'Espagne depuis 1808. Cette bataille est un moment fondateur pour la nation espagnole, au même titre que la Reconquista, la lente reconquête par les royaumes espagnols chrétiens de la péninsule ibérique musulmane depuis 711 (fin du dernier royaume musulman, le royaume de Grenade, en 1492). En effet, depuis 1808, se développe un sentiment anti- français à l'origine du nationalisme espagnol et qui va fédérer les Espagnols. Cette bataille qui oppose 100 000 combattants (48 500 du côté de la coalition et 50 000 du côté français, 11200 morts) est remportée par la coalition, lui ouvrant la route de Madrid et mettant progressivement fin à la domination française en Espagne.


Ce qui frappe sur les photos, c'est la beauté et la sérénité des lieux. Aucun esprit frappeur des 6 Espagnols, morts sur le champs de bataille, n'est venu altérer la qualité de notre sommeil de citoyens français en ce lieu paisible.



 

Les deux jours suivants, nous les avons passés au plus près du centre-ville historique de Salamanque. Des 3 villes que nous avons visitées dans la très lointaine périphérie de Madrid, Salamanque est - sans aucun doute - ma préférée. D'abord, il reste un pont romain qui donne accès aux piétons et aux cyclistes au centre-ville et une vue exceptionnelle sur celui-ci, situé sur une colline.


Pont romain de Salamanque


Ensuite, la ville de Salamanque est probablement celle qui incarne au mieux l'architecture plateresque. C'est un style architectural propre aux Espagnols. Pour certains spécialistes, il s'agit d'un gothique tardif apparaissant en Espagne à la fin du XV°S. Les Espagnols n'ont pas adhéré à la Renaissance qu'ils considèrent comme un mouvement typiquement italien, alors qu'il existe aussi d'autres centres de la Renaissance comme les Flandres ou l'Allemagne. Pour d'autres auteurs, il s'agit d'un style de transition espagnol entre le gothique et la Renaissance.


Que veut dire plateresque ? C'est un terme traduit de l'espagnol platero qui signifie orfèvre et qui est utilisé pour la première fois par l'écrivain espagnol Cristobal de Villalon, pour décrire la façade de la cathédrale de Leon, en la comparant à un travail d'orfèvre. En gros, les structures des édifices demeurent gothiques avec de nombreux pinacles, arcs boutants, arcs brisés et gargouilles, mais les façades sont ornées de façon plus exubérante avec des blasons, médaillons, couronnes, fruits et autres. C'est donc le "triomphe du décor" qui fait la particularité de l'architecture plateresque et l'exemple le plus abouti est- probablement- la plaza mayor de Salamanque.



La plaza mayor incarne la perfection pour moi : de taille modeste, ce qui en fait un lieu à taille humaine, agréable et vivant avec ses nombreuses terrasses et ses touristes qui font des selfies, été comme hiver. Cet aspect est fascinant en Espagne : les Espagnols nient toute existence de l'hiver. L'hiver n'existe pas en Espagne : ils mangent dehors à midi (enfin à 14h00); fréquentent les terrasses en buvant un verre de vin rouge en mettant simplement une doudoune. Il faut dire que la température moyenne sur l'année est de 22 degrés en Andalousie, ce qui change la vie !


Pour moi, deux éléments ont tout particulièrement attiré mon attention. D'abord, l'éclairage de la place la nuit est remarquable avec un éclairage doux, un peu comme la lumière émanant d'une bougie, un jaune chaleureux, mais suffisamment intense pour mettre en valeur chaque détail des ornements des façades. Deuxièmement, les médaillons qui ornent ces mêmes façades et qui représentent les hommes et femmes importants de Salamanque du XVS sont, eux aussi, remarquables. Contrairement aux photos toutes plates, les hommes et femmes sculptés (c'est l'ancêtre de la 3D?) semblent vivants et prêts à sortir du cadre et à reprendre leurs activités.




De nombreux édifices sont de style plateresque qui fait ici l'unité de la vieille ville : la cathédrale vieille et nouvelle qui se mélangent sur le même site; l'université de Salamanque; les nombreux monastères, couvents, églises et demeures des élites urbaines.


Casa de las Conchas

Catedral Nueva

Palacio de la Salina

Un autre aspect m'a interpellée, irritée, à Salamanque et de façon plus générale en Espagne, c'est leur capacité à construire des bâtiments affreux à côté d'édifices remarquables. Je vais donner un exemple: la fameuse vue du centre ville à partir du pont romain. Je place le cadre: le fleuve, le pont, les murailles, la ville. Magnifique ! Émergent au dessus de la muraille, trois bâtiments récents, soit des cubes en béton. Ces trois bâtiments font partie de l'université de Salamanque, d'après notre carte. C'est là qu'on se rend compte de la chance que nous avons en France, où les bâtiments remarquables sont protégés par les Monuments Historiques, créés en 1830. En France, non seulement les édifices sont protégés, restaurés, entretenus (même si la situation n'est pas aussi idyllique que je la décris) mais leurs alentours le sont aussi. En effet, un "champs de visibilité de 500 mètres" entourant les Monuments classés a été mis en place, suite à une loi du 25 février 1943. Chaque modification ou construction d'un bâtiment dans la périphérie d'un Monument historique est soumise à une autorisation d'un Architecte des Bâtiments de France. Denis a souvent pesté contre cette loi qui impose des contraintes importantes en France mais, je trouve qu'elle nous évite les "horreurs" espagnoles.


Sur ces bonnes paroles, nous poursuivons notre voyage vers Ségovie.

6 comentarios


Josiane Besson
Josiane Besson
10 dic 2021

C'est magnifique

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Angèle KELLER
Angèle KELLER
08 dic 2021

De magnifiques paysages. Comme toujours vous nous mettez l'eau à la bouche. On aime beaucoup aussi les commentaires de Dominique (le métier reste chevillé au corps,)

Que nous réserve Ségovie ?

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Dominique
Dominique
08 dic 2021
Contestando a

Je pense que c'est plus la passion pour l'histoire que pour le métier d'enseignante qui me reste. En 31 ans d'enseignement, je pense que j'ai fait le tour mais j'ai toujours encore besoin de me pencher sur les bouquins, comprendre les choses que je vois et qui m'interrogent. Écrire en plus me permet de ne pas oublier, et je me rends compte que j'adore écrire. L'écriture permet d'approfondir la réflexion. Bref, je m'éclate et Denis aussi, je pense, entre ses photos, vidéos et textes.

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Patricia Kientz
Patricia Kientz
08 dic 2021

Vous m'énervez 😂

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Dominique
Dominique
08 dic 2021
Contestando a

Pourquoi ? L'article est trop court, je le savais !

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Denis
Denis
08 dic 2021

Droit de réponse 😊 : ce n'est pas la loi française de protection des monuments historiques que je conteste, ce sont d'une part les aberrations qui peuvent résulter d'une application parfois plus que zélée ou relevant du fait du Prince; et d'autre part l'absence de contrôle qui engendre des inégalités entre les autoconstructeurs qui passent outre, et les professionnels qui se retrouvent en situation de refuser à leurs clients de faire ce que leur voisin a réalisé illégalement sans aucune conséquence.

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© 2023 Dominique et Denis KRAUTH

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